Dans des eaux inconnues : comment les investisseurs peuvent contribuer à gérer la crise de l’eau
Janus Henderson a récemment animé la conférence « Uncharted Waters » sur la rareté de l’eau et ses implications pour les investisseurs. Cet article résume les points clés abordés lors de cette conférence.
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Principaux points à retenir :
- Sur la base des tendances actuelles, l’ONU prévoit un déficit mondial de 40 % d’approvisionnement en eau d’ici 2030, en raison de la demande mondiale croissante et du changement climatique.
- La crise de l’eau a un impact sur les entreprises de tous les secteurs forts consommateurs d’eau, dont l’alimentation et les boissons, l’exploitation minière et les semi-conducteurs.
- Des recherches approfondies sur les entreprises et leurs chaînes d’approvisionnement, ainsi qu’un engagement proactif, peuvent aider les investisseurs à atténuer les risques liés à l’eau et à tirer parti des opportunités associées à son utilisation plus rationnelle.
En octobre 2023, Janus Henderson a organisé la conférence « Uncharted waters » qui a exploré la rareté de l’eau et ses implications pour les investisseurs. Les analystes de l’équipe Investissement responsable et gouvernance de Janus Henderson ont discuté de leurs recherches sur les secteurs très consommateurs d’eau (secteurs qui utilisent le plus d’eau) et de l’impact de la raréfaction croissante de l’eau sur les entreprises. Gérants et analystes des fonds Janus Henderson ont parlé de l’importance d’une recherche distinctive et d’un engagement auprès des entreprises pour faire face aux risques liés à l’eau. Experts du CDP (anciennement Carbon Disclosure Project) et de China Water Risk ont également partagé leurs analyses sur les causes, les impacts et l’évolution de la crise mondiale de l’eau.
La sécurité de l’eau est depuis longtemps un défi mondial essentiel. Ces dernières années ont vu une accélération de la croissance démographique et de l’activité économique, ce qui a fait grimper la demande pour la ressource la plus précieuse de notre planète à des niveaux sans précédent – et insoutenables. Nous nous attendons à ce que l’aggravation du changement climatique exerce une pression supplémentaire sur l’approvisionnement mondial en eau. Si les tendances actuelles se poursuivent, d’ici 2030, l’ONU prévoit un déficit mondial de 40 % en eau douce, où la demande dépassera l’offre.
Tandis que la sensibilisation des investisseurs à la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre s’est intensifiée ces dernières années, une plus grande attention est nécessaire pour s’attaquer aux défis majeur de l’eau d’aujourd’hui. Comme l’explique succinctement la Dr Patricia Calderon, spécialiste de la sécurité de l’eau au sein de l’organisation internationale à but non lucratif CDP : « La crise de l’eau se rapproche de nos entreprises, de nos communautés et de nos foyers ».
Une accélération de la demande en eau
La pénurie d’eau représente des risques importants au sein de plusieurs secteurs. Certains d’entre eux ne surprennent pas, comme l’agriculture et l’alimentation et les boissons, mais d’autres industries, notamment l’exploitation minière et les semi-conducteurs, sont plus exposées aux risques liés à l’eau que certains ne le pensent. Prenons l’exemple de l’industrie des boissons alcoolisées : dans une bouteille classique, l’eau représente près de 90 % de la bière et 60 % des spiritueux. Mais si l’on tient compte de processus tels que le lavage des bouteilles, la réfrigération et la cuisson à la vapeur des céréales, l’intensité de l’eau est encore plus grande : jusqu’à 8 litres d’eau sont nécessaires pour produire un simple litre de bière. Pourtant, même cette quantité est faible par rapport à la quantité d’eau utilisée pour faire pousser les grains utilisés pour fabriquer de la bière – plus de 90 % de l’empreinte hydrique de la bière se trouve dans la chaîne d’approvisionnement agricole. En plus de sa forte consommation d’eau, cette industrie est très vulnérable aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement, car les risques accrus de sécheresses et d’inondations ont un impact à long terme sur le coût et la disponibilité des cultures essentielles.
Le secteur minier est la deuxième industrie la plus gourmande en eau après les services aux collectivités. À mesure de l'accélération de la demande de métaux essentiels à la transition énergétique, la consommation d’eau de l’industrie minière devrait encore augmenter. Il est alarmant de constater qu’un cinquième de toutes les mines analysées par Trucost sont situées dans des régions confrontées à un stress hydrique extrême, tandis que 27 % se trouvent dans des zones où le risque lié à l’eau devrait s’intensifier. Le Chile par exemple, qui représente près d’un tiers de l'offre mondial de cuivre, est confronté à des conditions de sécheresse chroniques.
La fabrication de semi-conducteurs est également incroyablement gourmande en eau, le processus de production nécessitant près de 1 000 milliards de litres par an, soit l’équivalent de la consommation annuelle d’eau de tous les ménages londoniens. Environ la moitié des étapes de fabrication nécessitent de l’eau « ultra-pure » pour des opérations telles que le nettoyage et le refroidissement – un processus nécessitant 1,5 litre d’eau ordinaire pour produire un litre d’eau d’une pureté acceptable. L’industrie des semi-conducteurs devrait atteindre 1 000 milliards de dollars de chiffre d'affaires d’ici 2030, grâce à l’essor de l’électrification, de l’informatique de pointe et de l’électronique automobile, qui augmenteront tous la demande en eau. En outre, la consommation d’eau par semi-conducteur augmente également en raison de facteurs tels que des processus de nœuds plus sophistiqués nécessitant le lavage d’un plus grand nombre de couches. Sans innovation, cela pourrait signifier une croissance exponentielle de la consommation d’eau dans ce secteur.
Pour placer dans leur contexte les menaces qui pèsent sur l’économie mondiale, l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (« International Food Policy Research Institute ») suggère que les pratiques actuelles habituelles de gestion de l’eau et les niveaux de productivité de l’eau pourraient menacer 45 % du PIB mondial en 2050. Ce chiffre devrait s’élever à 63 000 milliards de dollars, soit 1,5 fois la taille de l’économie mondiale actuelle.
Évaluation des risques et des opportunités
Un panel avec des membres des équipes d’investissement de Janus Henderson a révélé une prise de conscience des risques liés à l’eau, mais également des opportunités d’investissement associées à de meilleures données et analyses. Notre Gérant d’Actions durables mondiales Hamish Chamberlayne note que sa stratégie manque d’exposition aux risques visibles liés à l’eau, car elle exclut les industries à fort impact comme l’agriculture ou l’exploitation minière. Néanmoins, il est conscient des risques complexes et protéiformes liés à l’eau, y compris la gestion des déchets.
« Les produits chimiques impliqués dans la production de semi-conducteurs ont été un domaine d’intérêt majeur pour nous au cours de l’année dernière », explique M. Chamberlayne. « Notre objectif est de comprendre la quantité de déchets dangereux et de pollution à laquelle les entreprises sont exposées, car nous assistons à des controverses majeures qui peuvent avoir un impact financier important. »
Compte tenu de l’omniprésence des facteurs de risque liés à l’eau dans tous les secteurs, l’engagement proactif des investisseurs devient impératif, affirme Tal Lomnitzer, gestionnaire d’investissement senior au sein de l’équipe Global Natural Resources de Janus Henderson. « Les outils d’investissement comme les feuilles de calcul permettent d'examiner le risque financier traditionnel, mais lorsqu’il s’agit de risques non traditionnels, rien ne remplace un casque de sécurité et des bottes à embout d’acier pour se rendre sur un site. »
En plus de ses impressions sur le terrain, M. Lomnitzer estime que certaines des meilleures analyses sur une entreprise peuvent souvent être découvertes au-delà des discours policés offerts par les dirigeants d’entreprise. Ici, M. Lomnitzer cherche à obtenir les points de vue d’un échantillon plus large de la communauté, y compris les travailleurs locaux, les chauffeurs de taxi et les hôteliers, ainsi que les gouvernements locaux et les autorités de tutelle. Ces analyses peuvent être utilisées dans le cadre de nos engagements actifs, dans le cadre desquels nous encourageons les entreprises à prendre des mesures dans le meilleur intérêt de leurs flux de trésorerie durables à long terme.
En termes d’opportunités, Kimberley Pavier, analyste en durabilité au sein de l’équipe Global Technology Leaders de Janus Henderson Investors, est enthousiasmée par la perspective de données plus complètes et détaillées, d’autant plus qu’il reste un important déficit de connaissances sur les infrastructures hydrauliques et les écosystèmes océaniques.
Pour s’y retrouver dans les complexités associées aux projets liés à l’eau et à l’océan, Mme Pavier s’attend à un déploiement accru d’outils numériques et d’analyse de données, tels que des capteurs, des images satellites et des outils d’intelligence artificielle. Elle est convaincue que ces instruments peuvent aider à détecter des opportunités dans l’économie de l'océan, qui devrait passer de 1 500 milliards de dollars à 3 000 milliards de dollars d’ici 2030.
À mesure que les investisseurs commencent à s’intéresser davantage à l’eau, tant en termes de risques que d’opportunités, la marée ne fera que monter dans les prochaines années. Michelle Dunstan, Directrice de la responsabilité chez Janus Henderson Investors, le résume ainsi : « Beaucoup d’investisseurs sont en retard parce qu’ils se sont concentrés sur le carbone, la biodiversité et le capital naturel, mais le thème de l’eau approche »
Notre approche de l'intégration des facteurs ESG : réfléchie, pratique, axée sur la recherche et tournée vers l'avenir.
Source : Janus Henderson, au 17 octobre 2023.
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